La croix d’honneur
Air : Halte là ! la garde royale est là !
Quelle profusion rare
La cour étale à présent !
Henri n’était qu’un avare
Près d’un Roi si bienfaisant.
Sur des provinces entières
À grands flots on voit tomber
Des croix et des tabatières…
Il suffit de se courber.
Quel bonheur! (Bis.)
J’obtiendrai la croix d’honneur !
Vous riez, amis… Silence !
Eh quoi ! ne savez-vous pas
Que pour certaine Excellence
J’ai fait des vers assez plats ?
Or, c’est bien la moindre chose
Qu’une médaille du Roi,
Quand plus d’un flatteur en prose
Déjà s’en pare avant moi.
Quel bonheur! (Bis.)
J’obtiendrai la croix d’honneur !
Le public en vain se moque
De l’auteur d’un madrigal,
Des héros de notre époque
Je pourrai marcher l’égal ;
Si, fier de ses longs services,
Un vétéran me bravait,
Qu’il montre ses cicatrices,
Je montrerai mon brevet.
Quel bonheur! (Bis.)
J’obtiendrai la croix d’honneur !
Quand sur des têtes serviles
Tous les Rois sèment leurs dons,
Que de Français turcophiles
Sont chamarrés de cordons,
À qui, par reconnaissance,
Le Grand Seigneur devait bien,
Pour le salut de la France,
Envoyer aussi le sien.
Quel bonheur! (Bis.)
J’obtiendrai la croix d’honneur !
1828
Moreau fit cette chanson à l’occasion d’une croix d’honneur
que Charles X avait donnée à M. Gervais, maire de Provins. Moreau
regretta ensuite ce mouvement d’humeur contre un homme qui
l’obligea. [R. Vallery-Radot]