1. On conserve à l’imprimerie Lebeau, à Provins, les espaces sur lesquelles Hégésippe Moreau improvisa ses premiers vers. Ces vers sont écrits à la mine de plomb et à peu près illisibles aujourd’hui.
2. Ces deux pièces, dont l’original existe encore, m’ont été remises avec une copie authentique de l’abbé Grabut.
3. Dans les honorables sympathies qui ont accueilli la première partie de ce travail : Hégésippe Moreau, sa Vie et ses Œuvres, je distinguerai spécialement celles qui ont été utiles et fécondes en révélations sur le poëte du Myosotis :
M. Louis Ulbach, dans le Temps (27 avril 1863), a apporté une nouvelle lumière sur le caractère politique du poëte ; il a confirmé, par des témoignages nouveaux, ce que Félix Pyat et Laurent Pichat avaient dit.
M. Edmond Texier, dans le Siècle
(27 avril 1863), a donné des renseignements définitifs sur le vaudeville
Clément Marot à Genève, attribué au poëte du
Mysotis. La vérité, dit M. Texier, est
que Moreau avait pris part à la collaboration de ce vaudeville ;
c’est lui-même qui me l’a dit le soir de la première
représentation.
M. Albéric Second, dans l’Univers illustré (7 mai 1863), après avoir très-sympathiquement raconté l’existence douloureuse de Moreau, croit que j’accuse à tort la société de l’avoir laissé mourir de faim. M. Albéric Second, dont la vie fut un constant dévouement à ses confrères, M. Albéric Second qui ferma les yeux à l’excellent Louis Lurine, veilla au chevet de Henri Murger, demanda un tombeau121 pour Brizeux, eût pensionné Hégésippe Moreau au nom de la Société des gens de lettres. Voilà des sentiments qui honorent un écrivain !
M. Xavier Feyrnet, dans l’Illustration (2 mai 1863), raconte
ce fait qui m’était inconnu : M. Armand Lebailly dit
qu’un théâtre joua, en 1838, Clément Marot à
Genève. Le poëte du Myosotis fit aussi,
avec un ami, un vaudeville qui s’appelait le
Collaborateur. Les deux auteurs n’avaient plus entendu parler de
leur pièce depuis quelque temps ; ils se la figuraient dormant dans un
des cartons de la direction, lorsqu’un beau jour ils furent très-surpris
de voir le Collaborateur s’étaler en
grosses lettres sur l’affiche ; mais ce qui les surprit bien
davantage, c’est que l’ouvrage n’avait plus deux auteurs
seulement, mais cinq, et que trois autres noms faisaient cortège aux leurs.
Ce fait m’a été confirmé à Provins par des personnes très-dignes de foi,
qui le tenait de Moreau lui-même. Je m’étonne de n’avoir pas connu
plus tôt cette particularité, car comme le disait M. Henry de Pène dans
le Nord (2 avril 1860), je
m’étais mis à la recherche de tout ce qui pouvait éclairer cette pâle et
poétique figure de Moreau qui ne fut jamais bien comprise.
4. Cette nouvelle, Une Femme sensible, fut publiée par Psyché, le 4 février 1836. Psyché est un des journaux auxquels Moreau collabora le plus assidûment : il ne signait pas toujours. Ainsi, dans la collection complète du recueil, on ne retrouve pas Lolotte et Loulou, conte dont il annonce, par une lettre à sa sœur, l’acceptation et la remise au bureaux de la rédaction.
5. Cette nouvelle, la Dame de cœur, fut publiée par le Petit Courrier des Dames, le 20 septembre
1836. Hégésippe Moreau ne fit que passer dans ce recueil où la charmante
nouvelle fut oubliée. Cependant le poëte avait fait paraître, dans le Petit Courrier des Dames, sa romance la Fermière (20 décembre 1835) et ses couplets
à122 Médor ou
le Petit Chien (mars 1836). La Dame de Cœurcœur
fût sans doute restée ensevelie dans ce journal ignoré, si Moreau n’en
eût, de son vivant, remis une copie à un de ses amis qui l’adressa à
la Feuille de Provins, qui la publia. Or, de
ces deux versions qui changent un peu, j’ai choisi celle qui fut corrigée
par le poëte, c’est-à-dire celle du Petit
Courrier des Dames. Cette nouvelle porte en sous-titre Extrait
des confessions d’un vieil enfant, ouvrage inédit.
Or, cet
ouvrage inédit n’est jamais paru ; on n’en retrouve aucune
trace. Les habitudes de Moreau pourront seules ici nous éclairer, et, à cet
effet, je citerai le fragment d’une lettre qu’un ami particulier du
poëte m’a adressée de Lons-le-Saunier, le 13 mai 1863.
Moreau, composait souvent, sans écrire un mot, deux ou
trois cents vers. Que de fois il m’en a dit de sa voix harmonieuse en
nous promenant sous les grands arbres de nos remparts de Provins, ou bien sur
les quais de Paris, qu’il aimait le soir ! J’habitais alors
quai Voltaire, nº 21. En fumant une pipe, que nous croyions toujours
être la dernière du jour, il montait chez moi : il dictait,
j’écrivais ; il emportait le tout, et moi, ne croyant pas à une
disparition si prompte et si fatale du poète, je ne gardais ni ne cherchais à
revoir les vers. Souvent, trop souvent, il n’en trouvait pas le
placement, et le papier dépositaire de petits chefs-d’œuvre s’en
allait on ne sait où. De temps en temps, un journal acceptait ses productions
contre une somme insultante de minimité. Fouillez, monsieur, dans la collection
du Charivari, et vous y trouverez plus
d’une pièce de vers échangée par les fameux trois hommes d’État
contre dix francs.
Sur les renseignements de cette lettre, qui
coïncidaient parfaitement avec ceux que je tenais de Provins, j’ai
fouillé le Charivari et j’ai trouvé,
de 1834 à 1837, bon nombre de chansonnettes politiques qui ont la saveur du
génie de Moreau, et ne portent aucune signature. Ces pièces se détachent des
autres pièces, qui sont signées au moins des initiales des trois hommes
d’État, par un fini et une malice qui trahissent le Diogène. Cette collaboration, à123 laquelle Moreau n’attacha sans doute pas
d’importance, s’explique surtout par l’intérêt affectueux que
Berthaud, l’auteur de l’Homme
rouge et rédacteur ordinaire du Charivari, portait au poëte du Myosotis. Pour me renseigner, j’ai consulté
les hommes d’État qui m’ont donné des réponses si évasives et si
peu satisfaisantes qu’on les dirait sous le poids d’un remords
qu’ils veulent étouffer. Du reste, en ces temps-là, la signature
littéraire n’était pas partout en usage, et dans les journaux de mode
surtout. C’est ce qui fait que d’Hégésippe Moreau qui collabora
sûrement, de 1830 à 1835, au Follet, à la Mode, au Protée, au Caprice, au Petit
Messager des Demoiselles, on ne retrouve pas le moindre
souvenir. Cependant, dans le Petit Courrier des
Dames (1830), on lit deux nouvelles non signées qui concordent tant avec
les habitudes, le domicile et le génie du poëte, qu’on aurait de graves
motifs de les lui attribuer : Un Dîner chez
Véry et Un Jeune Homme à marier
(extrait de Ma confession). Mais on ne
saurait rien affirmer. En ce temps-là, Moreau avait bien peu de relations et
d’amis à Paris. De 1835 à 1838, la lumière se fait pour lui et le
directeur de la Revue poétique, après avoir
publié le Revenant et Surgite mortui, disait en note : Les deux
chansons que nous offrons au public révèlent un des disciples les plus
spirituels de notre immortel Béranger. Nous publierons plus tard des œuvres
d’un genre plus sévère qui annoncent, dans M. Moreau, l’accord
d’un beau talent et d’une haute philosophie.
Dans la suite, on
ne publia rien.
6. Cet article M. Scribe à l’Académie fut écrit par
Hégésippe Moreau dans une crêmerie de la rue des Saints-Pères et publié par
Psyché le 28 janvier 1836. Il fut payé
d’un déjeuner. Psyché payait ses
rédacteurs avec une côtelette, et ses rédactrices avec un chapeau de paille. Le
poëte, du moins, l’assure dans ses lettres. Moreau ne pensait pas comme
M. Ernest Legouvé (Moniteur,
22 février 1861) qu’avec Scribe on revoyait d’un regard, on
embrassait comme dans un tableau une succession inouïe de travaux si divers,
et,124 grâce à cette puissance d’invention,
de travaux sans exemple, l’Europe entière tributaire de l’esprit
français, les mœurs, les habitudes, le langage de la France conquérant les
capitales comme nos armées les avaient conquises jadis, et enfin, pour tout
dire en un mot, le souvenir d’une intelligence qui avait autant amusé le
monde que Voltaire l’avait remué.
M. Scribe avait refusé sa
collaboration à Moreau.
7. Cette phrase est un souvenir de la grande
invasion de 1814, qui laissa des traces sinistres à Provins, puisque 12 à 15
millions ne pourraient indemniser les cent six communes de
l’arrondissement des pertes énormes qu’il avait éprouvées depuis
les huit jours d’occupation par l’ennemi,
si on en croit le rapport
de la municipalité.
8. Cette étude historique fut publiée par le Journal des Demoiselles, le 15 mai 1836. Elle faisait partie d’une suite de travaux que publiait ce recueil sous le titre de Galerie des femmes célèbres, pour laquelle M. Henri Martin écrivit, le 15 novembre 1836, une étude sur sainte Geneviève de Nanterre.
9. Quand Moreau écrivit cette lettre, il avait dix ans. Il était en pension à Provins, et cette année, il obtint beaucoup de prix. Il eut, entre autres, le prix d’écriture, et il le méritait, car Moreau, si j’en crois ses autographes, avait un talent de calligraphe.
10. Ces lettres de Moreau à sa sœur sont de 1829 à 1836. Elles n’ont pas de date ; mais, quand on a étudié la vie du poëte, on sait où les placer. Ces lettres sont des billets d’une grande simplicité et d’un grand charme. On voit que Louise Lebeau était une mère pour le poëte, et que, s’il l’appelait sa sœur, c’est qu’il était impossible qu’il l’appelât sa mère : Moreau était plus vieux qu’elle de quelques mois. Dans ces pages volantes, on retrouve des sentiments qui ne meurent pas, la reconnaissance et le125 respect. Moreau reçoit de sa sœur tout ce qu’il demande et tout ce dont il a besoin : du linge, des commestibles et des fleurs, car le poëte en demandait quelquefois pour orner sa chambre.
11. Moreau, ici, semble désappointé. Ce
n’est pas au poëte la faute, mais bien à M. Guérard, qui avait
promis de l’aller voir et de lui porter un de ces canards dont
M. C. Opoix dit, dans son Histoire de
Provins : Un propriétaire d’un moulin de la Voulzie,
M. Guérard, m’assure qu’il est dans l’usage
d’envoyer à Paris des canards à quelques amis qui leur trouvent un goût
très-fin et une chair plus délicate que ceux que l’on vend partout
ailleurs.
Ce canard-là n’eût pas été mal reçu par Moreau : il
l’attendait pour dîner.
12. Cette lettre est remarquable par la pièce À mon âme dans laquelle se trouvent des variantes nombreuses avec l’édition du Myosotis, corrigée par Moreau lui-même.
13. Ces vers, adressés à M. de Vigny en mai 1835, furent le commencement des relations du poëte du Myosotis avec le poëte d’Eloa. Ils sont publiés aujourd’hui pour la première fois. M. de Vigny doit les mettre en appendice à la prochaine édition de Stello. L’original, que j’ai eu dans les mains, porte la suscription : À monsieur le comte Alfred de Vigny, Paris ; et il est signé : H. Moreau, place Cambray, hôtel du Calvados.